Saint Augustin par Philippe de Champaigne (détail) Los Angeles County Museum of Art |
Augustin tient une place à part,
non seulement au sein de l’Eglise, mais également au sein de l’histoire
littéraire. Son œuvre est immense, 113 titres, 500 sermons et 218 lettres conservés,
et les travaux exégétiques qu’elle inspira, innombrables. Il est, à n’en pas
douter, le plus lu des Pères de l’Eglise et le seul qui soit, à ce jour, publié
dans la prestigieuse « Bibliothèque de la Pléiade »[1].
Cette popularité qui depuis
longtemps atteint le grand public, Augustin la doit tout autant à la profondeur
de sa pensée qu’à la qualité littéraire de ses écrits. Comme l’a très justement
exprimé Giovanni Papini, « Le secret de sa grandeur comme écrivain, et
aussi comme penseur, réside en ceci qu’il vit ce qu’il médite et sent
profondément ce qu’il dit. Pour lui Dieu n’est pas un concept, un objet de
connaissance pure, mais une réalité vivante dont il attend la joie ; le
vrai n’est pas seulement une chose qui s’apprend mais un bien qu’il cherche à
s’approprier, une part de sa substance quotidienne ; le christianisme
n’est pas seulement un recueil de doctrines, mais une vie qu’il faut vivre
intégralement. Les problèmes les plus élevés, il les a rapportés à son propre
moi, il a intériorisé la théologie, il a fait fondre la pensée abstraite dans
le creuset de son cœur, il a volé jusqu’au firmament de l’idéologie, mais avec
des ailes de feu. »[2]
Sa vie nous est fort bien connue
et nous possédons en ses Confessions
un extraordinaire témoignage autobiographique qui nous mène jusqu’à sa trente et
unième année. On connaît par là les lectures qui, d’une illumination à l’autre,
le menèrent à la conversion : l’Hortensius
de Cicéron en 372, les Ennéades de
Plotin en 386 et enfin, les épîtres de Saint Paul qui l’amèneront à se faire
baptiser par Saint Ambroise, dans la nuit du 24 au 25 avril 387, à l’âge de 33
ans.
Dès lors, la lecture de la Bible
ou plus précisément des Ecritures[3],
accompagnera l’existence et nourrira tous les travaux de Saint Augustin. Comme
l’explique Henri-Irénée Marrou dans son Saint
Augustin et l’augustinisme[4] :
« L’Ecriture Sainte est pour saint Augustin la Somme de toute vérité, la source
de toute doctrine, le centre de toute culture chrétienne et de toute vie
spirituelle ; sa théologie est très directement biblique, sa catéchèse ne l’est
pas moins. A mesure qu’on se familiarise davantage avec l’œuvre et le style de
saint Augustin on est de plus en plus sensible à cette présence de l’Ecriture. Des
érudits minutieux ont relevé, dans l’édition des Bénédictins de Saint-Maur,
13 276 citations de l’Ancien Testament et 29 540 du Nouveau. Il y en
a en réalité beaucoup plus, mais il est difficile d’avancer un chiffre précis,
car commet faire la part des citations formelles, des adaptations ingénieuses à
un contexte nouveau, des réminiscences voulues ou inconscientes ? Homme
d’Eglise, saint Augustin a assimilé sa Bible comme dans sa jeunesse, il avait
appris à assimiler Cicéron et Virgile : son style s’émaille d’elle comme
il reste, quelque effort qu’il fît, imprégné de formules classiques. »[5]
Voilà qui explique qu’un volume,
un seul au sein des huit qui constituent la collection « La Bible de tous les temps », soit consacré à un auteur plutôt qu’à une époque. Ouvrage
collectif paru en 1986, Saint Augustin et la Bible fut dirigé par l’historienne des religions Anne-Marie de la
Bonnardière, qui a tant œuvré à une meilleure connaissance du christianisme
primitif en général et de Saint Augustin en particulier.[6]
C’est à elle que l’on doit la fameuse Biblia
Augustiniana : sept volumes d’exploration de l’œuvre d’Augustin qui
forment un répertoire exhaustif des citations bibliques dans leur ordre chronologique
tout en les replaçant dans leur contexte historique.
On imagine qu’un tel patronage ne
va pas sans porter ses fruits. Si bien que La
Bible de Saint Augustin, sans épuiser un sujet par nature inépuisable[7],
apporte une contribution essentielle à cette question.
Pour en savoir plus, il suffit de cliquer sur le livre ci-dessous :
[1] Trois
volumes recueillant les plus importantes œuvres d’Augustin y ont été édités
sous la direction de Lucien Jerphagnon entre 1998 et 2002.
[2] Giovanni
Papini, Saint Augustin, éd. Plon,
coll. Le roseau d’or, 1930, p. 255.
[3] Comme le
précise James J. O’Donnell dans l’Encyclopédie Saint Augustin : « Augustin
n’a jamais vu une Bible. Le corps de textes que nous considérons maintenant
comme bibliques lui a été transmis comme étant les "Ecritures". Il en
a eu connaissance en des livres séparés […] La première Bible "latine"
que l’on connaisse et qui regroupe toute l’Ecriture en un seul volume remonte à
Cassiodore, au milieu du Vie siècle. » in Encyclopédie Saint Augustin. La Méditerranée et l'Europe IVe -XXIe
siècle, édition française sous la direction de Marie-Anne Vannier, éd. du
Cerf, 2005, p. 153.
[4] Henri-Irénée
Marrou, Saint Augustin et l’augustinisme,
éd. du Seuil, coll. Maîtres spirituels, 1955. Ce petit livre est certainement,
aujourd’hui encore, la meilleure introduction qui soit à l’évêque d’Hippone et
à son œuvre.
[5]Ibidem, p. 57.
[6] Anne-Marie
La Bonnardière (1906-1998). Pour en savoir plus sur cette femme remarquable, on
pourra lire le bel hommage que lui rendît Elizabeth Paoli au lendemain de sa
disparition en cliquant ici.
[7] En
témoigne le colloque international « Saint Augustin et la Bible » organisé les
7 et 8 avril 2005 par le centre Theles de l’université de Metz et dont les actes ont été publiés aux éditions scientifiques internationales Peter Lang.
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