Gershom Scholem (1897-1982) |
Les éditions de l’éclat ont la
bonne idée de republier dans leur collection de poche Le prix d’Israël de Gershom Scholem. Ce livre, initialement paru en 2003,
recueille quatorze essais politiques (sous forme de lettres, d’articles ou de
discours) que le grand philosophe et historien du judaïsme écrivit entre 1919
et 1974. Il permet de saisir tout à la fois l’évolution et la constance de la
pensée politique de celui qui consacra son existence à redécouvrir et à faire
connaître la kabbale et, plus généralement, la mystique juive. Plus encore, il
permet de mieux comprendre, par le prisme politique, la personnalité complexe
d’un des grands intellectuels du XXe siècle[1].
Chez Scholem prédomine l’idée que
l’héritage culturel, et donc religieux, doit irriguer les concepts sociaux et
politiques. D’où découle un sionisme qui, visant bien au-delà de la simple
création d’un État, est vécu comme un ressourcement culturel sur une terre
réelle[2],
un mouvement de renaissance du peuple juif :
« Si le rêve du sionisme est
fait de chiffres et des “frontières“, et s’il ne peut pas exister sans cela, eh
bien il est voué à l’échec, ou plus exactement il a déjà échoué. Et même si les
mots “esprit“ et “force intérieure“ sont devenus aujourd’hui objets de
raillerie et de dérision dans le camp sioniste, nous devons dire clairement et
redire encore que s’il est vrai que le travail du sionisme dans la réalité est
un travail externe, un travail de chiffres, le rêve attaché à cette réalité est
d’une autre nature. »[3]
Si l’actualité de ces textes
pourtant anciens est frappante, c’est parce que Scholem voit au-delà des faits
et qu’en abordant les problèmes de son temps, il convoque les questions qui se
posent symboliquement depuis toujours au peuple juif et aujourd’hui même, à la
société israélienne, comme à la diaspora.
Pour en savoir plus :
256 pages, 9 euros |
[1] Au sujet
de Gershom Scholem, on lira avec profit : David Biale, Gershom Scholem. Cabale et contre-histoire, éd. de l’éclat, 2001.
[2] À ce
sujet on se reportera également à l’autobiographie de Scholem, De Berlin à Jérusalem, éd. Albin Michel,
1984. Sur la dissociation, possible ou non, de l'antisémitisme et de l'antisionisme, on conseillera la lecture d'Un chrétien pour Israël, de Jacques Ellul, tout particulièrement la troisième partie du premier chapitre. Jacques Ellul, Le défi nouveau, Oeuvres théologiques 1948-1991, éd. La Table Ronde, 2006, p. 797-811.
[3] Gershom
Scholem, Le prix d’Israël, éd. de l’éclat,
2003, p. 54.
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