Pages

mardi 15 septembre 2015

Droit d’auteur : Hugo ou Balzac ?

Beauchesne

Alors que la Commission Européenne s'est mise en tête de réformer le droit d’auteur, le Syndicat National des Editeurs monte au créneau. Richard Malka lui prête sa plume et signe un opuscule intitulé La gratuité, c’est le vol, opuscule gratuitement distribué (!) dans les librairies et légalement téléchargeable ici.

En préambule, l'auteur fait valoir une citation extraite de la Lettre adressée aux écrivains français du XIXe siècle par Balzac. De cette véritable profession de foi, publiée le 1er novembre 1834 dans la Revue de Paris, naîtra, quatre ans plus tard, le premier « syndicat » d’écrivains, la Société des Gens de Lettres à laquelle Balzac adhérera :

« S’il est au monde une propriété sacrée, s’il est quelque chose qui puisse appartenir à l’homme, n’est-ce pas ce que l’homme crée entre le ciel et la terre, ce qui n’a de racine que dans l’intelligence, et qui fleurit dans tous les cœurs. »[1]

A cette belle citation, un mauvais esprit ne manquerait pas d'opposer la suivante. Il est vrai qu'elle provient d'un membre non moins illustre de la S.G.D.L., Victor Hugo :

« Le livre, comme livre, appartient à l’auteur, mais comme pensée, il appartient – le mot n’est pas trop vaste – au genre humain. Toutes les intelligences y ont droit. Si l’un des deux droits, le droit de l’écrivain et le droit de l’esprit humain, devait être sacrifié, ce serait, certes, les droit de l’écrivain, car l’intérêt public est notre préoccupation unique, et tous, je le déclare, doivent passer avant nous. »[2]

Entre les Châtiments et les Illusions perdues, il ne reste plus qu’à choisir son camp. Souhaitons seulement qu'auteurs et éditeurs n'en deviennent pas pour autant Misérables.

G. M.




[1] « Lettre adressée aux écrivains français du XIXe siècle » in Honoré de Balzac, Œuvres diverses, tome 2, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 1996.
[2] « Discours d’ouverture du congrès littéraire international de 1878 » in Victor Hugo, Œuvres complètes, Actes et Paroles vol. IV, Depuis l’exil, 1876-1885, éd. Albin Michel, 1926, p.94.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire