Le cardianl Daniélou 1905-1974 |
Jean Daniélou consacra la plus
importante part de son œuvre à l’étude des Pères de l’Eglise. Il fut, avec ses
amis Henri de Lubac et Hans Urs von Balthasar[1],
l’un des premiers et plus importants artisans du renouveau des études
patristique au milieu du XXe siècle[2].
Il s’intéressa tout particulièrement à la symbolique de la tradition
judéo-chrétienne et à la rencontre de cette dernière avec la symbolique
platonicienne. En témoigne sa thèse de doctorat en théologie, reprise et
soutenue en 1943 à la Sorbonne sous la direction d’Emile Bréhier comme thèse de
doctorat ès Lettres, intitulée Platonisme
et théologie mystique. Essai sur la doctrine spirituelle de Grégoire de Nysse[3].
En 1950 paraît Sacramentum futuri. Etude sur les origines de la typologie biblique : « J’ai, dans Sacramentum futuri, étudié successivement le caractère figuratif
d’Adam, d’Abel, de Noé, de Moïse, en montrant comment ils sont les figures de
l’eau et du Christ. [4] »
Dans cet ouvrage, Jean Daniélou met à profit sa profonde connaissance des Pères
de l’Eglise afin de rétablir l’exégèse spirituelle et son usage liturgique.
Mircea Eliade, le grand historien des religions, fit vraisemblablement
compliment de ce volume à Daniélou puisque ce dernier lui écrit le 6 décembre
1952[5] :
« Je suis heureux de ce que vous me dites de Sacramentum futuri [...]. Je
crois qu’à partir de perspectives différentes nos recherches convergent. Il
s’agit en somme de symboliques comparées et de situer la symbolique biblique
dans une symbolique générale. Ce qui me frappe en ce moment, ce n’est pas tant
la ressemblance de la symbolique biblique et de celle des autres religions,
mais la relation inverse. Je me demande si l’interprétation des religions "naturelles"
comme première alliance, telle que nous la donne l’histoire de Noé ne serait
pas la vraie. En ce cas un rite comme l’effusion d’eau pour provoquer la pluie
ne serait pas une sorte de magie sympathique agissant d’après un système de
correspondance, mais un sacrement de l’alliance cosmique, destiné à rappeler à
Dieu qu’il s’est engagé par serment "à donner les pluies et les
saisons fécondes" (act. ap., XVI, 17). » [6]
Jésuite, c’est tout naturellement
que Jean Daniélou publia plusieurs de ses ouvrages aux éditions Beauchesne qui
furent, durant de longues années, liées à la Compagnie de Jésus[7]. En 1963, il y
fonda la collection « Théologie historique » afin d’y faire paraître,
notamment, les travaux issus de la Faculté de Théologie de Paris où il enseigna
l’histoire des origines chrétiennes et dont il fut le doyen. Notons que cette
collection connut une belle postérité puisqu’elle compte aujourd’hui 122
volumes et qu’un 123ième paraîtra tout prochainement.
G. M.
Œuvres de Jean Daniélou parues aux éditions Beauchesne :
[1] Il est à
noter que ces trois grands théologiens furent créés cardinaux. En 1969 pour
Daniélou, en 1983 pour de Lubac et enfin, en 1988 pour Balthasar.
[2] Rappelons
qu’il fut, avec Henri de Lubac et Claude Mondésert, le fondateur de la
collection « Sources Chrétiennes » (éditions de textes patristiques,
accompagnées de traduction et de commentaire) en 1942-1943, collection dont les
éditions du Cerf viennent de faire paraître le 580e volume.
[3] Thèse
publiée en 1944 aux éditions Aubier, dans la collection « Théologie ».
[4] Jean
Daniélou, Et qui est mon prochain.
Mémoires, éd. Stock, 1974, p. 131.
[5] De cette
lettre, on ne nous donne que le jour et le mois, mais on peut avec certitude la
dater de l’année 1952, puisqu’on y apprend que Daniélou est invité pour la
première fois à participer au Cercle d’Eranos à Ascona. Or, comme l’indique
Eliade dans ses mémoires, la première conférence de Daniélou se produit au mois
d’août 1953, cf. Mircea Eliade, Les
moisson du solstice, éd. Gallimard, 1973, p. 172. La conférence de Daniélou
aura pour thème la Terre et Paradis chez
les Pères de l’Église tandis que celle d’Eliade traitera de La Terre-Mère et les Hiérogamies cosmiques,
cf. Eranos Jahrbuch 1953, Mensch und Erde,
éd. Rhein-Verlag, 1954.
[6] Lettre
de Jean Daniélou à Mircea Eliade in Cahier
de l’Herne Mircea Eliade, éd. de l’Herne, 1978, p. 283.
[7] Il y publiera en 1969 le "livre où je me suis peut-être le plus profondément exprimé : La Foi de toujours et l'homme d'auourd'hui, qui groupe six conférences que j'avais données à la salle Pleyel." Jean Daniélou, Et qui est mon prochain. Mémoires, éd. Stock, 1974, p. 144.
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